L’air frais d'octobre emporte la saison de maisons hantées et films d'horreur. Certains d'entre nous aiment avoir peur, d'autres ne l’aiment pas. Mais que se passe-t-il si nous ne ressentons pas la moindre peur lorsque nous regardons un film d’horreur ? C'est peut-être difficile à imaginer, mais c'est le cas d'une femme appelée S.M. S.M. souffre de la maladie d’Urbach-Wiethe, une maladie génétique rare qui endommage son amygdale. L'amygdale est une structure en forme d'amande située dans le lobe temporal du cerveau, qui joue un rôle dans des fonctions telles que l'émotion et la mémoire. Malgré les dommages à l’amygdale que S.M a subis et l’altération de sa peur qui en a résulté, elle a des résultats dans la moyenne pour les tests d’intelligence, de mémoire et de langage. Les scientifiques ont étudié S.M. depuis les années 1990 pour en savoir plus sur les mécanismes neuronaux à la base de la peur. Une des premières études avec S.M. était une classification d’expressions faciales. Les chercheurs ont présenté à S.M. des images de gens avec différentes expressions faciales (heureuse, triste, effrayée, surprise, dégoûtée, en colère et neutre) et elle devait évaluer l’intensité de chaque expression en fonction de divers adjectifs émotionnels (heureuse, triste, dégoûtée, en colère, effrayée, surprise, consciente, somnolent et intéressé) sur une échelle de 0 à 5. Les scores que SM donnait pour l’intensité des expressions faciales effrayées étaient plus faibles que celles données par les personnes saines et les personnes atteintes de lésions cérébrales dans d’autres régions que l'amygdale. Cela suggère que S.M. avait du mal à reconnaître une expression effrayée. Il est important de noter que sa déficience n’était pas due à une incapacité à reconnaître les visages en général ; elle pouvait parfaitement identifier les individus dans les photos présentées. Figure 1. Un exemple de différentes expressions faciales semblables aux photos montrées à S.M. Ces images sont extraites des images d’affection du visage d’Ekman-Friesen. Dans une autre expérience, des scientifiques ont cherché à savoir si des environnements et des stimuli effrayants pouvaient faire peur à S.M. Ils l'ont emmenée dans une maison hantée et dans une animalerie où ils lui ont montré des serpents et des araignées pour voir sa réaction, mais S.M. était plutôt curieuse au lieu d’avoir peur. Au lieu de crier, elle a ri face aux acteurs de la maison hantée et a même effrayé un des acteurs lorsqu’elle a enfoncé son doigt dans le costume pour voir de quoi il était fait ! Elle était en tête du groupe durant la visite de la maison hantée et a tenu les serpents dans l'animalerie sans hésiter. Au cours de ces expériences, S.M. a dit qu'elle ressentait une peur minime, mais était très excitée et curieuse. Dans une autre tentative d'observer si S.M. pouvait avoir peur, les chercheurs lui ont également montré des films d'horreur. Sans surprise, elle n'a rapporté aucune peur en regardant ces vidéos. Cependant, tout au long de ces expériences, il était clair que S.M. comprenait le concept de la peur, car elle était capable de se rendre compte que d’autres pouvaient être effrayés dans ces situations, même si elle n’avait pas eu peur.
Pourquoi S.M. est-elle incapable d'avoir peur quand elle fait face à des images et des environnements effrayants ? Les scientifiques ont émis l’hypothèse que les dommages causés à l’amygdale de S.M. interrompent les circuits neuronaux qui déclenchent une réaction de peur. Lorsque l’être humain est confronté à des phénomènes effrayants ou menaçants dans l’environnement, le circuit neuronal entre le tronc cérébral et l'hypothalamus est activé. Les dommages causés à l'amygdale peuvent empêcher la communication entre ces régions et ainsi empêcher les choses effrayantes de notre environnement de déclencher une réaction de peur. Cependant, cela ne signifie pas que S.M. ne peut jamais avoir peur. Des études antérieures menées sur des animaux ont montré que l'inhalation de dioxyde de carbone (CO2) peut également déclencher une réaction de peur. Lorsque S.M. a participé à une expérience similaire et a inhalé du CO2, elle et deux autres patients présentant des lésions de l'amygdale ont déclaré avoir peur. Les trois patients ont même eu des attaques de panique déclenchées par le CO2 ! La capacité de S.M. à ressentir la peur dans cette étude est probablement due à l’inhalation de CO2 activant des voies sensorielles et des régions du cerveau différentes de celles activées par les événements externes utilisés lors d’expériences précédentes. En conclusion, il semble qu'il existe plusieurs voies pour évoquer une réponse de peur et le type de stimuli détermine quelle voie est activée. Alors, la prochaine fois que vous regarderez un film d'horreur et vous aurez peur, vous pourrez blâmer votre amygdale ! Écrit par Stéphanie Édité par Roni Références Adolphs, R., Tranel, D., Damasio, H., & Damasio, A. (1994). Impaired recognition of emotion in facial expressions following bilateral damage to the human amygdala. Nature, 372(6507), 669-672. Ekman, P., and Friesen, W. V. (1976). Pictures of Facial Affect. Palo Alto, CA: Consulting Psychologists Press. Feinstein, J. S., Adolphs, R., Damasio, A., & Tranel, D. (2011). The human amygdala and the induction and experience of fear. Current Biology, 21(1), 34-38. Feinstein, J. S., Buzza, C., Hurlemann, R., Follmer, R. L., Dahdaleh, N. S., Coryell, W. H., ... & Wemmie, J. A. (2013). Fear and panic in humans with bilateral amygdala damage. Nature Neuroscience, 16(3), 270.
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